PLU2 : les Muchaux de nouveau dans le viseur !

Retour sur l’avis du Préfet et de l’autorité environnementale Hauts-de-France avant le démarrage de l’enquête publique. 

Le projet de nouveau quartier aux Muchaux sera présenté tel quel dans le PLU2 qui arrive à la phase de l’enquête publique à partir du 20 novembre 2018 (et jusqu’en janvier 2019). Deux nouveaux avis (et non des moindres!) s’ajoutent pourtant à la longue liste de réserves sur ce projet d’aménagement.

Contre les Muchaux, la liste s’allonge !

À chaque lecture d’avis de personnes publiques associées, on ressort la longue liste des avis très réservés, voire carrément contre le projet. Après les citoyens, les agriculteurs, la commission de préservation des espaces agricoles, un avis négatif en enquête publique, les réserves de la commission d’enquête du SCoT, une évaluation environnementale calamiteuse, une réserve du Conseil municipal de Saint-André… voici deux nouveaux avis plus ou moins explicitement très durs avec le projet des Muchaux :

  1. l’avis du préfet sur le projet arrêté de PLU2 de la MEL, 27 avril 2018
  2. l’avis délibéré de la Mission régionale d’autorité environnementale Hauts-de-France – MRAe –, 26 avril 2018

1. L’avis du préfet sur les extensions urbaines : le compte n’y est pas !

L’avis du Préfet insiste sur l’importante consommation foncière prévue dans le PLU2 : “1119 ha en extension urbaine (pour les 10 prochaines années), c’est une consommation à peu près égale à celle constatée sur la MEL ces 10 dernières années”. Bref, si les enjeux climatiques sont plus préoccupants que jamais, à la MEL, on garde le même cap que celui qui avait été fixé en 2004 (date du précédent PLU). Grenelle Environnement, Plans Climat, Transition énergétique…? Non, depuis 14 ans, la Métropole ne ressent pas le besoin de changer de modèle. Inquiétant ! Car le préfet l’exprime clairement “la consommation d’espaces agricoles et naturels n’apparaît toujours pas proportionnée aux enjeux de développement par territoires de la métropole”.

Saint-André, consommateur de terres agricoles !

Le préfet pointe que “sur les 85 communes concernées par le PLU2, 67 bénéficient d’une ouverture à l’urbanisation”. Et surprise, dans la liste des communes qui consomme du foncier en extension urbaine, il y a… Saint-André ! Avec autant de friches industrielles permettant de (re)développer la ville sur la ville, il est totalement inexplicable de retrouver notre commune dans cette liste. Avec 5,87 ha, il y aura plus de consommation des terres agricoles à Saint-André qu’à Verlinghem ! Bien entendu, ces hectares sont associés au projet des Muchaux… mais que les élus de Saint-André assument : Les Muchaux, ce n’est pas qu’un projet de Lambersart puisque la commune de Saint-André choisit aussi de détruire les quelques terres agricoles qui restent sur sa commune !

Les hémicycles, l’impact sur l’agriculture : quand c’est flou…

Le préfet demande de “poursuivre l’effort de réduction de l’extension urbaine programmée”. Difficile de ne pas voir un lien avec le projet des Muchaux qui est la plus importante zone d’extension urbaine du nouveau PLU pour toute la métropole… dans un secteur d’hémicycle censé préserver les terres agricoles de la pression urbaine ! La protection par les hémicycles, le préfet revient précisément dessus. Le PLU “contient une carte des hémicycles à l’échelle de la MEL, qui ne saurait constituer une limite précise de ces hémicycles. (…) le SCoT indique clairement que “la localisation précise des limites des hémicycles sera fixée dans les PLU” et que “les hémicycles n’ont pas vocation à accueillir d’urbanisation nouvelle”. Selon l’avis de l’Etat, “l’absence de délimitation précise de ces hémicycles, seule à même de garantir à terme la limitation de la tache centrale de l’agglomération, pourrait fragiliser la sécurité juridique de votre document au regard de sa compatibilité au SCoT”. Dans le rapport, il est bien précisé que “l’absence de délimitation précise des hémicycles pourrait constituer un motif d’incompatibilité au SCoT de Lille Métropole”. En d’autres termes, maintenir un flou autour de la délimitation des hémicycles pour permettre l’urbanisation des Muchaux, conduit à fragiliser “la sécurité juridique” du PLU2 tout entier.

Ajoutons que l’avis du Préfet pointe l’insuffisance de l’analyse du PLU2 en ce qui concerne l’impact du projet sur les espaces agricoles (sièges d’exploitation, surfaces agricoles utiles, accessibilité des parcelles…). L’absence de ces éléments n’a pas permis aux services de l’Etat “de porter un avis circonstancié sur la cohérence de la localisation des zones à urbaniser par rapport à la préservation des zones agricoles actuelles”. Bref, la consommation foncière doit être analysée au regard du principe “éviter, réduire, compenser” ce que le PLU2 n’a justement pas fait..

2. L’avis de la MRAe : les Muchaux, un motif d’incompatibilité manifeste !

Dans son avis délibéré n°2018-2280 adopté lors de la séance du 26 avril 2018 par la mission régionale d’autorité environnementale (MRAE) de la région Hauts-de-France, les Muchaux sont très directement ciblés. En fait, c’est tellement limpide, qu’on vous laisse lire l’intégralité du passage sur les hémicycles…

“L’analyse de la compatibilité avec le SCoT de Lille Métropole mériterait particulièrement d’être approfondie. En effet, des incohérences apparaissent entre le document d’orientation et d’objectifs (DOO) et le projet d’aménagement et de développement durable du plan local d’urbanisme intercommunal en ce qui concerne les « hémicycles » que le SCoT identifie comme étant des espaces agricoles et naturels attenant à l’urbanisation.

En page 10 du DOO, il est écrit qu’il convient d’identifier les limites à l’urbanisation de l’agglomération centrale, comprenant l’agglomération d’Armentières et de la vallée de la Lys. Les hémicycles constituent l’une de ces limites » et page 17 « les hémicycles sont des entités agro-paysagères situées aux franges de l’agglomération centrale »

Le SCoT impose aux plans locaux d’urbanisme d’identifier les limites de l’agglomération centrale, notamment par l’identification des hémicycles (page 17 du DOO). Une cartographie associée les localise. Le projet d’aménagement et de développement durable et l’orientation d’aménagement et de programmation thématique « aménagement » reprennent ce concept d’hémicycles. Cependant, ceux-ci sont peu ou pas délimités dans le projet de plan local d’urbanisme et il est très difficile de les repérer sur la cartographie. Sur la carte ci-dessous (page 89 du projet d’aménagement et de développement durable), on constate que la localisation et la dynamique exprimée par les flèches figurant une offre foncière font pression sur les hémicycles.

De plus, l’hémicycle identifié par le SCoT entre les communes de Lambersart, Wambrechies et Pérenchies n’est pas respecté : une orientation d’aménagement et de programmation couvrant environ 35 hectares prend place sur le site des Muchaux (cerclé en rouge sur la carte 2 ci-dessus) à Lambersart, zone identifiée en hémicycle dans le SCoT.

Par ailleurs, le SCoT impose de « maintenir les coupures urbaines existantes afin d’éviter la jonction avec des communes ou des hameaux actuellement distincts ». Cette disposition est reprise page 35 du projet d’aménagement et de développement durable : « Maintenir les coupures urbaines dans le développement périphérique des communes ».

Le bluff de l’ancien maire de Lambersart tombe à l’eau !

Oui, l’autorité environnementale parle explicitement “d’incohérence” entre le SCoT et le PLU2, alors que légalement le PLU2 doit être légalement compatible avec le SCoT. L’avis est très clair : “L’hémicycle n’est pas respecté”, le projet des Muchaux prend place sur “une zone identifiée en hémicycle”. Rappelez-vous la position de M.Daubresse reprise dans La Voix du Nord en mars 2017 : Aux Muchaux, « il n’y a pas d’hémicycle, c’est très clair ». Ce qui est de plus en plus clair aujourd’hui, c’est qu’il n’y a plus que l’ancien maire de Lambersart pour croire que les Muchaux ne sont pas concernés par un hémicycle !

“L’autorité environnementale recommande :

  • que l’évaluation environnementale traite la question des hémicycles (espaces agricoles et naturels attenant à l’urbanisation) avec précision dans l’analyse de l’articulation du plan local d’urbanisme intercommunal avec le SCoT de Lille Métropole ;
  • d’assurer la compatibilité du plan local d’urbanisme intercommunal avec le SCoT de Lille Métropole.”

Les recommandations sont limpides : il faut s’assurer de la compatibilité du PLU avec le SCoT. Sous-entendu, ces documents ne sont pas compatibles, à cause du projet des Muchaux. Le PLU2 est ainsi fragilisé juridiquement par l’existence même de ce projet de nouveau quartier. De là à penser que le projet des Muchaux est un motif d’incompatibilité manifeste et qu’il faut le retirer des choix d’extension urbaine du PLU2… il n’y a qu’un pas.

Et les zones humides ? Toujours ce flou !

L’autorité environnementale ne s’arrête pas là, et souligne “que le plan local d’urbanisme intercommunal n’est pas compatible avec le SAGE de la Lys” (Schéma d’aménagement et de gestion des eaux de la Lys
sage-lys.net/). En effet, le SAGE demande explicitement qu’un “inventaire cartographique et une hiérarchisation des zones humides de leur territoire soit établie”. Or, “l’analyse des zones humides n’a pas été conduite et, faute de connaissance précise et complète de ces zones, la démarche d’évitement, à défaut de réduction et en dernier lieu de compensation, ne peut être menée”. Encore mieux, si on regarde dans les dizaines d’amendements de M.Daubresse sur le PLU2 pour le Conseil Métropolitain du 19/10/2017 (figure ci-dessous), on remarque qu’il a même été jusqu’à faire retirer du plan la zone à dominante humide du quartier des Muchaux ! Incroyable ! Non content de négliger l’analyse des zones humides, le PLU2 va même jusqu’à les supprimer quand cela gêne certains intérêts ! Trop fort !

Comparaison entre le Plan de destination des sols avant/après 19 oct. 2017

Comparaison entre le Plan de destination des sols avant/après 19/10/2017

Comparaison entre le Plan de destination des sols avant/après 19/10/2017

On résume. Les avis du Préfet et de l’autorité environnementale pointent avec force :

  • la consommation excessive des terres agricoles dans le PLU2 ;
  • l’analyse insuffisante de l’impact du projet PLU2 sur les espaces agricoles et sur les zones humides ;
  • le non respect de l’hémicycle et le flou autour de leur délimitation = motif d’incompatibilité manifeste avec le SCoT !

Trois arguments supplémentaires qui nous amèneront à demander le retrait du projet des Muchaux lors de l’enquête publique du PLU2.